Surveillance - 22.02, 01.03 et 08.03.2025

Un soleil resplendissant me réchauffe la nuque. Une Fauvette à tête noire s'égosille ; plus loin, un merle semble lui répondre. La vapeur de mon café danse dans la lumière chaude. Un mouvement furtif me fait machinalement tourner la tête. Mon regard se pose alors sur ce beau mâle à la calotte noire légèrement hérissée, mandibule tendue à quarante-cinq degrés comme pour matériellement lancer son chant aussi loin que possible. De l'autre côté de ma fenêtre, ma concentration doit lutter contre mon syndrome de la page blanche, fort satisfait de cette somptueuse distraction.

Le souvenir des deux premiers samedis de surveillance m'est on-ne-peut-guère-plus contrastant avec la chaleur printanière nous inondant, la fauvette et moi. On gelait, sur ce parking de la Vigier! Même avec une grosse doudoune sur le dos et un bonnet enfoncé sur le crâne, la température, souvent aidée d'une solide bise, nous saisissait implacablement. Et quel contraste de couleurs aussi, entre le vert vif de la haie de mon jardin et le gris ambiant des murs de la cimenterie, des parois les surplombant et du ciel toisant le tout! Mais chaque fois, malgré ces conditions, plusieur·e·s cépobien·ne·s étaient au rendez-vous. Et même si la réputation de la résistance (ou l'insensibilité?) des membres de l'association aux conditions climatiques parfois extrêmes n'est de loin plus à prouver, je pense ne pas être le seul à m'être demandé si le réveil et le déplacement en valait vraiment la peine, ces matins-là. Et en me reposant la question aujourd'hui, mon syndrome de la page blanche s'évanouit.

Il ne s'est pas passé grand-chose du côté du couple de pèlerins. Comme l'année passée, le printemps était peu avancé à ces dates fixes, et le couple n'avait pas encore pondu (et ce, même lors du dernier samedi de surveillance). Pendant les deux premiers samedis, aucune visite de cavité n'a même été observée ; seuls quelques comportements de défense, d'abord au-dessus des parois à l'est puis au-dessus de celles à l'ouest, montraient l'intérêt du couple à s'installer ; mais où?
Au moins, ils se sont montrés et ce, chaque samedi ; on ne peut pas en dire autant tous les ans.

Et il n'y a pas que les pèlerins qui peuvent valoir de déplacement, heureusement pour les "petites" années comme celle-ci. Les Hirondelles de rochers étaient présentes dès le premier samedi. Les Cincles et Bergeronnettes des ruisseaux égayaient le canal comme à leur habitude. Quelques Chamois broutaient au loin. Les Chardonnerets et quelques Mésanges chantaient, parfois bien en vue. Et le ticho' s'est même laissé observer quelques minutes.

Et il y avait évidemment les tant traditionnelles que délicieuses pâtisseries de Daisy, qu'on ne remerciera jamais à la hauteur du bonheur de nos papilles! On les a accompagnées comme d'habitude d'un thé fumant dans l'ombre de la montagne de Plagne, et surtout de discussions nombreuses et variées, des récits des derniers périples aux projets de futurs voyages, en passant par un review du marché des pièges photos ou encore les détails de la complexité d'un shootings de Cincles sous une cascade.

Le dernier des trois samedis était un peu moins hivernal. Le couple de pèlerins semblait cette fois avoir choisi sa cavité, la même que l'année passée ; on n'en saura pas plus ce jour-là. L'heure de la fondue est vite arrivée. On s'est installé au soleil, on a rangé les vestes et sorti les fourchettes. Il fallait amicalement batailler, à une vingtaine pour deux caquelons ; il y a eu deux fournées. Une fois de plus, la saison de surveillance s'est clôturée sur de belles discussions.
À l'année prochaine!

Liste non exhaustive des espèces observées durant les trois samedis:

Bergeronnette des ruisseaux
Bergeronnette grise
Buse variable
Canard colvert
Chardonneret élégant
Cincle plongeur
Corneille noire
Faucon crécerelle
Faucon pèlerin
Grand Corbeau
Hirondelle de rochers
Merle noir
Mésange bleue
Mésange charbonnière
Milan royal
Pigeon ramier
Tichodrome échelette

Chamois

Gauvain Saucy

photo : Gauvain Saucy